Toinette répondit à Charlotte :
« Madame Sabine est faible, Mademoiselle, mais a une forte volonté. Elle se remettra vite. »Elle fit signe à George de la suivre. Après quelques pas avec la montagne de vêtements, quand elle pensa être suffisamment éloignée, elle lui souffla :
« C’est Mademoiselle Charlotte Touttain ! C’est son père qui est médecin… » Les invités du Comte furent conduits par Georges dans le salon.
Celui-ci, assez vaste, présentait des fauteuils aux motifs floraux alignés au millimètre sur un tapis au point très serré. Des consoles en bois du Liban recouvertes de marbres étaient situées entre les fenêtres. De lourds rideaux encadraient des fenêtres rectangulaires.
La maison était connectée au réseau électrique, comme l’attestait le lustre moderne, dans ce style que l’on appelle paradoxalement « Modern Style » en France, et « Art Nouveau » en Angleterre. Un vase
Daum posée sur une crédence rappelait les motifs du lustre, faits de fleurs bleues et de feuilles sur un verre translucide.
Le Comte, prévenu par Georges, entra dans la pièce d’un pas alerte, arrêtant par son arrivée la conversation entre les trois invités. Il voulut se montrer avenant, mais il masquait mal son anxiété, trop perceptible.
Il s’arrêta d’abord devant Rochelle. Il se pencha pour un baisemain, ses lèvres s’arrêtant à quelques millimètres du gant :
« Madame la Baronne, je suis heureux que vous me fassiez l’honneur de votre visite. Paris n’a que d’éloges pour votre charisme, et mais je vois que ce ne sont que des euphémismes. Soyez dans cette humble demeure comme chez vous. »Il attendit la réponse polie avant de se tourner vers Charlotte.
« Charlotte, Georges se sera mépris sur votre profession par manque d’informations de ma part. Votre père est retenu ? Je suis heureux de vous voir. Sabine le sera également. »Charlotte connaissant depuis longtemps la nièce du Comte, parisienne. Le Comte avait pris l’habitude d’appeler la jeune femme par son prénom lorsqu’elle était adolescente. L’habitude était restée. Evidemment, Charlotte avait déjà rencontré Sabine, cependant la différence d’âge ne les avait pas plus lié que cela.
Enfin, il serra chaleureusement la main de l’aventurier :
« Merci d’avoir répondu à mon appel, monsieur Battlestone. Je vous en sais gré. Vous le comprendrez. »Le Comte s’écarta légèrement, invitant le trio à se déplacer vers son bureau. On pouvait y accéder depuis le salon par une porte aux boiseries sculptées.
« Georges, vous nous apporterez un rafraichissement. » Il lui fit signe de rester une fois cela fait, comme prévu.