Sa compagne d'un soir contre son épaule, William E Battlestone quitta le bal. Non sans avoir auparavant congratulé l'ambassadrice pour son sens inégalable de la réception.
« Digne des plus beaux bals de Schönbrunn » dit il avant un baise main des plus convenables.
Il salua ensuite l'ambassadeur avant de sortir, son chapeau de feutre enfoncé bas sur son front.
Pièce jointe :
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Il affecta une attitude des plus attentive envers la danseuse qui l'accompagnait. Ainsi, les dernières personnes qui pourraient éventuellement le reconnaitre, songeraient qu'il allait sans aucun doute passer la nuit chez cette jeune personne.
En réalité, c'est bien chastement qu'il la raccompagna sur le pas de la porte de son appartement Rue de la Paix. Il ordonna ensuite au cocher de le déposer à quelques pâtés de maison, Faubourg St Honoré.
Ayant rejoint son logis, sans perdre un instant, Battlestone s'attabla à son secrétaire et commença de rédiger un article et un rapport plus détaillé sur les manœuvres officieuses de l'Allemagne. Plans de batailles envisagés et projets de construction navale.
William écrivait vite, tapait tout aussi rapidement et ingurgitait quantité de café. Toutefois, ses pensées ne cessaient de retourner vers la même personne et ce souvenir seul semblait éteindre l'éclat des chandeliers. Il avait du mal à se concentrer mais finit par aboutir à rédiger deux papiers corrects.
William n'avait généralement que peu besoin de sommeil. Toutefois, vers 3h00 du matin, il s'accorda du repos. Il ne s'agissait pas d'arriver les yeux cernés et baillant à avaler les mouches, à son rendez vous de l’après midi.
Le lendemain, en cours de matinée, Battlestone sortit de chez lui. Il prit un thé à côté du temple anglican dans la ruelle qui faisait face à l'ambassade de Grande Bretagne (Qui, par quel incroyable hasard, se trouvait non loin de chez lui). C'est là qu'il remit son premier papier à Bartie Spence, le commis du Graphic et du Guardian. L'article paraitrait probablement dans ce dernier puisqu'il se plaçait plutôt en opposition par rapport au ministère de Salisbury, et que le Graphic n'en avait que pour la guerre contre les Mahdistes en Afrique, gravures épiques à l'appui.
Un peu plus tard il remit discrètement l'autre pli - un article très détaillé - à l'un des hommes de Rosebery. Charge à lui à présent de faire savoir que l'Allemagne était le véritable ennemi et non un allié potentiel comme le hurlait haut et fort Chamberlain et une bonne partie des conservateurs.
Son devoir accompli, William attrapa sa canne d'un air plus léger et tout en marchand à travers les rues de Paris lisait les dernières nouvelles. Son aspect lui valurent quelques regards caustiques de la part de passants suffisamment observateurs pour deviner en lui un citoyen britannique.
Il comprit pourquoi en lisant les dernières nouvelles. Défendant avec un peu trop de zèle les intérêts coloniaux anglais, Kitchener remontait la vallée du Nil et pendant ce temps Marchands et ses tirailleurs sénégalais fonçaient vers le Soudan pour y défendre les possessions françaises. La confrontation était inévitable.
William grogna et pesta contre l'incompétence, l'orgueil et la stupidité de Salisbury et de tous ses sbires nationalistes.
C'est d'une humeur plutôt orageuse qu'il parvint au bout du faubourg Saint Honoré. Rageur, il jeta ses journaux au fond d'une poubelle ferrée.
William prit un léger repas dans une des célèbres Brasseries parisiennes. Puis, essayant d'éviter les rares flâneurs trop perspicaces, il descendit la rue de la Pyramide afin de rejoindre les Tuileries.
Sous les ombrages des grands arbres, il tenta d'apaiser sa colère - lui un combattant de la paix, il ne voyait que guerres et agressions autours de lui. Le soleil de mai et l'espoir d'une nouvelle rencontre avec la baronne agissaient cependant comme un baume, une onde fraiche aux senteurs épicées.