« Je vais la prendre. Je ne suis pas partisane des gravures mais tant qu'elle fait son office, ca me va. Je veux faire plus que l'essayer, je veux la porter. Je la consacrerai ce soir. »

Il était rare de voir Héléa se comporter en pretresse mais pourtant, tel était une partie de son métier. Défaisant son armure d'écailles, elle se préta au jeu de l'essayage et de l'ajustement. Bien sur, l'armure etait plus lourde et l'encombrerait mais ca ne serait que temporaire, le temps qu'elle s'en accommode.

La pretresse fit quelque pas hasardeux avant de s'arreter:

« Et mon pere porte ca jour et nuit... Je sais pas comment il fait... »

Observant son armure d'ecaille, elle posa la main dessus:

« Tu m'as bien servi. Tu vas repartir d'où tu viens et servir quelqu'un d'autre maintenant. »

La rangeant precautionneusement dans son sac, Héléa enchaina quelques autres pas, un saut, s'accroupit avant de se relever et de s'etirer:

« C'est pas encore trop ça mais ça va venir. »

Se tournant vers la mairesse, elle lui accorda un salut:

« Je vous remercie pour ceci, madame. Nous pouvons y aller, Kendra. Nous avons du travail. »

« Si tu allais jouer avec la Teigne, Aeren? »

La pretresse accorda un sourire a l'enfant, indiquant son chien a coté d'elle. Ce dernier, remuant la queue a l'appel de son nom, jappa devant l'enfant pour attirer son attention avant de s'eloigner un peu et de se retourner pour japper de nouveau. Une fois sure que l'enfant n'entendrait pas, Héléa enchaina:

« Il y a eu un incident a la verrerie. Des gobelins, qui ont profité de tunnels, s'y sont introduits et s'en sont pris aux ouvriers sur place. Dont Drent. Quand nous sommes arrives, il n'y avait plus rien a faire d'autre que de finir le travail que les ouvriers avaient commencé, en exterminant les gobelins restants. »

Héléa enjolivait l'histoire, epargnant les details du massacre et donnant le beau role aux morts mais elle preferait cette version. Deja parce qu'elle evitait d'impliquer le vrai responsable et risquer de voir la haine contre Tsuto deborder sur Ameiko mais aussi et surtout, donner une bonne image des disparus pour leur famille. Le moral etait important, surtout a l'aube des derniers evenements et une attaque sans doute imminente. Un regain de fierte et de courage, donné par des actes de proches tombés au combat, ne pouvait etre qu'un plus. La jeune femme attendit que le choc passe, laissant la mairesse ajouter quelque chose si elle le souhaitait. Elle esperait juste que les autres n'iraient pas raconter une version differente... Elle aurait le temps de leur expliquer plus tard.

« Ça n'est pas ma tasse de thé non plus. Mais c'est la bonne chose à faire. »

La prêtresse suivit la mairesse, avant d'ajouter:

« Si les gobelins attaquent, vous aurez une tripotée de maisons à visiter... On va essayer de faire que ça n'arrive pas. »

« J'ai une armure à consacrer et du matériel à entretenir. Puis j'irais voir Vic ou Volar pour discuter des jours à venir. Mais avant tout ça, un bon repas et un bon bain bien chaud. »

Héléa gloussa. Elle n'avait pas grand chose d'autres à faire, de toute façon.

« Aussi gai et joyeux que l'enterrement d'un enfant. »

Héléa eut une moue triste en ajoutant sa réplique sans humour, aussi enchaîna-t'elle, à voix basse cette fois:

« J'ai raconté comment les ouvriers avaient défendu la ville contre un assaut gobelin et qu'on était juste arrivé pour faire le ménage, en épargnant les détails sur Tsuto et Ameiko. Comme ça, ça donnera un beau souvenir aux familles... Rien à voir avec ce qu'on a vu. »

Picorant dans son plat, elle demanda:

« Et toi? Tu as fait quoi depuis ce matin? »

Vérifiant à son entrée les visages connus et inconnus, Mérisiel se dirigea donc vers la table d'Héléa pour s'y assoir en souriant.
« Mission de reconnaissance des accès terminée.
J'ai bien besoin de me laver et de manger solide .... »